Aux adhérents de l’AFPEP – SNPP

 

Paris le  07 Mai 2004

 

Chers Collègues,

Un mois déjà que notre nouveau ministre Mr Philippe Douste-Blazy a pris ses fonctions. Un mois pour sortir de son chapeau une première innovation : le dossier médical unique informatisé, sorte de condensé du carnet de santé et de la carte vitale, appelé à devenir la clef de voûte du système de soins et surtout du remboursement.

Cette solution semble recueillir les suffrages de tous les partenaires, et notamment plusieurs syndicats médicaux, qui n'y voient que des avantages : pas de répétition des examens inutiles, limitation des prescriptions médicamenteuses, responsabilisation des patients... Elle intègre en outre le respect de critères de bonne pratique dûment évaluées qui pourraient également figurer dans ce dossier.

Comment s'opposer à de telles intentions ? Comment contester la pertinence, tant médicale qu'économique, de ces petits moyens tout simples et frappés du sceau du bon sens ? C'est bien ce qui fait leur succès et suscite une aussi large adhésion. Une seule question se pose : pourquoi ne pas y avoir pensé plus tôt ?

Enfin un moyen de mettre les médecins au pas pensent sans doute les technocrates avides de contrôle sur la santé. Enfin un moyen de faire reconnaître nos compétences pensent peut-être les médecins désireux de sortir de l'impasse financière dans laquelle nous nous trouvons. Le destin de l’exercice libéral est donc clairement balisé : encadrement des pratiques en vue d’une revalorisation – espérée mais incertaine – des actes. Le piège est énorme.

Défendre la psychiatrie libérale impose de rappeler les exigences qui la fondent : engagement, responsabilité, liberté d'orientation thérapeutique, indépendance professionnelle et absolue garantie de confidentialité.

Faire figurer sur une carte à puce chaque consultation, ainsi que les hypothèses diagnostiques et les traitements, non seulement constitue une atteinte au secret médical mais encore dénie au patient toute capacité à narrer librement son histoire. Or c’est précisément ce qui pousse le patient à rencontrer un psychiatre libéral, et sans doute aussi tout praticien libéral.

Ces mesures, si simples et apparemment si utiles, ne sont donc rien d’autre que la transposition du dossier hospitalier au système libéral. Or nous savons bien à quel point ce dossier fait finalement disparaître derrière la maladie, le patient devenu totalement transparent au fil de son parcours hospitalier.

Les patients ne s’y trompent pas. Ils plébiscitent les médecins libéraux afin de retrouver les conditions d’une rencontre dont nous devons préserver les ressorts afin de pouvoir les soigner.

C’est pourquoi nous ne pouvons que nous opposer à ce dossier médical unique informatisé.

Dans le même ordre d’idées, nous avons été alertés des tentatives de certaines assurances privées de faire signer des contrats à certains praticiens permettant le règlement des actes en tiers payant pour les patients. Sans doute verrons-nous apparaître quelques mesures incitatives, financières ou autres, propres à séduire les praticiens qui se hasarderaient à signer ces contrats. Ils risquent pourtant de les aliéner bien au-delà de ce que nous connaissons actuellement.

C’est au nom d’une conception bien différente de la pratique libérale que nous avons refusé toute nomenclaturisation des psychothérapies et toute partition de notre acte de soin. Dans le prolongement du plan Cléry-Melin, ces questions sont actuellement toujours en débat au ministère et à la CNAM-TS mais nous maintenons fermement notre demande d’une cotation unique pour tout acte psychiatrique.

Il nous faut aussi parler des SROS de troisième génération qui commencent à être élaborés dans toutes les régions. Ce projet de réorganisation de l’offre de soins inclue la médecine libérale et nous devons être particulièrement vigilants au regard des risques de dérive hospitalocentrique qu’il présente. En l’absence de circulaire redéfinissant les compétences des ARH le texte n’est pas applicable en l’état mais il donne déjà lieu à des réflexions au sein de certaines commissions régionales. Nous devons être présents dans ces commissions afin de réaffirmer la spécificité de la psychiatrie libérale, ainsi que sa complémentarité avec le secteur médico-social et le secteur hospitalier.

Toutes ces concertations ne seront efficaces que si nous parvenons toutefois à maintenir une très forte pression sur le terrain. Les bruits circulant à propos de la réforme de l’Assurance Maladie n’augurent rien de favorable pour la médecine libérale, volontiers désignée comme responsable du déficit, dans le déni absolu de sa spécificité et de la confiance que lui accordent les patients.

Nous maintenons la revendication d’une revalorisation du tarif opposable à 50 euros pour le CPsy et la possibilité d’un espace de liberté tarifaire. Nous pensons qu’il convient de maintenir un usage aussi élargi que possible du DE. Nous savons que l’application de ce mot d’ordre entraîne la généralisation des sanctions par les CPAM (sanctions financières ou menaces de déconvention-nement) face auxquelles il convient de réagir en fonction de la cohésion locale et de l’importance du front de solidarité de l’ensemble des médecins. Nous vous rappelons que nous tenons à votre disposition un dossier juridique à même d’étayer des réponses aux Caisses s’il y a lieu.

 

Bien amicalement.

 

Jean-Jacques LABOUTIERE

 

Yves FROGER

              Président de l’AFPEP – SNPP

Secrétaire Général de l’AFPEP – SNPP

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